

La définition de l’offre anormalement basse (OAB)
Code polynésien des marchés publics
- Article LP 122-3 :
11° bis°offre anormalement basse, offre dont le prix est manifestement sous-évalué et de nature à compromettre la bonne exécution du marché ;
- Article LP 235-3 :
I – L’acheteur public vérifie que les offres sont régulières, acceptables et appropriées.
II. – Dans les procédures d’appel d’offres et les procédures adaptées sans négociation, les offres irrégulières, inappropriées ou inacceptables sont éliminées. Toutefois, l’acheteur public peut autoriser tous les candidats concernés à régulariser les offres irrégulières dans un délai approprié, à condition qu’elles ne soient pas anormalement basses.
III. – Dans les autres procédures, les offres inappropriées sont éliminées. Les offres irrégulières ou inacceptables peuvent devenir régulières ou acceptables à l’issue de la négociation ou du dialogue, à condition qu’elles ne soient pas anormalement basses.
Lorsque la négociation ou le dialogue a pris fin, les offres qui demeurent irrégulières ou inacceptables sont éliminées.
IV. – La régularisation des offres irrégulières ne peut avoir pour effet de modifier des caractéristiques substantielles des offres.
V. – L’acheteur public met en œuvre tous moyens lui permettant de détecter les offres anormalement basses. Si une offre paraît anormalement basse, l’acheteur public demande au candidat qu’il fournisse les précisions et justifications sur le montant de son offre. Si, après vérification des justifications fournies, l’acheteur public établit que l’offre est anormalement basse, il la rejette dans des conditions prévues par arrêté pris en conseil des ministres.
VI. – Les offres qui n’ont pas été éliminées en application du II, III et du V sont jugées au regard du ou des critères annoncés dans l’avis d’appel public à la concurrence ou dans les documents de la consultation, puis sont classées par ordre décroissant. L’offre économiquement la plus avantageuse choisie en application du ou des critères annoncés est l’offre la mieux classée par l’acheteur public.
- Article A 235-2 :
L’acheteur peut apprécier le caractère anormalement bas d’une offre notamment, au vu de toutes les composantes de l’offre présentée, des obligations qui s’imposent aux candidats, au moyen de l’utilisation d’une formule mathématique permettant de déterminer un seuil d’anomalie, par comparaison avec les autres offres ou avec son estimation.
Lorsque l’acheteur identifie une offre qui paraît anormalement basse, il demande par écrit au candidat qu’il précise et justifie le prix ou les coûts proposés.
Peuvent être prises en considération des justifications tenant notamment aux aspects suivants :
1° Le mode de fabrication des produits, les modalités de la prestation des services, le procédé de construction ;
2° Les solutions techniques adoptées ou les conditions particulièrement favorables dont dispose le candidat pour fournir les produits ou les services ou pour exécuter les travaux ;
3° L’originalité de l’offre.
L’acheteur rejette l’offre si les éléments fournis par le candidat ne permettent pas de justifier de manière satisfaisante le prix ou les coûts proposés.
La notion d’offre anormalement basse (OAB) a été définie dans le Code Polynésien des Marchés Publics (CPMP) à l’article LP 122-3, 11° bis. Elle vise à protéger l’acheteur public polynésien des offres financièrement irréalistes susceptibles de mettre en péril la bonne exécution des contrats. Cette fiche pratique explique la définition désormais légale de l’OAB, la procédure contradictoire à suivre avant tout rejet qui préexistait, le caractère irrégulier et non régularisable de telles offres, donne des exemples concrets pour les identifier, et présente des références jurisprudentielles utiles pour éclairer cette notion.
Définition légale (Article LP 122-3, 11° bis CPMP) – Une offre anormalement basse est définie comme « une offre dont le prix est manifestement sous-évalué et de nature à compromettre la bonne exécution du marché ». En d’autres termes, il s’agit d’une offre dont le montant très faible ne correspond pas à la réalité économique du projet et fait craindre que le titulaire ne puisse mener le marché à bien dans les conditions prévues. Cette définition codifie une notion déjà reconnue par la jurisprudence, notamment par le Conseil d’État.
⚠️ Pourquoi encadrer les offres anormalement basses ? Retenir une offre anormalement basse peut porter atteinte à l’égalité entre candidats et à l’efficacité de la commande publique. Un prix anormalement bas, s’il n’est pas justifié par des facteurs objectifs, peut résulter de pratiques déloyales (dumping social, non-respect de la réglementation) ou d’une erreur de chiffrage, et il fait peser un risque sérieux de mauvaise exécution du marché (voir plus bas les risques encourus). Le CPMP consacre donc cette notion afin de permettre à l’acheteur public de détecter et écarter de telles offres avant l’attribution du marché.
Avant de rejeter une offre suspectée d’être anormalement basse, l’acheteur public a l’obligation de mener une procédure contradictoire avec le soumissionnaire concerné. Cette étape est imposée par la loi et constitue un passage incontournable afin de respecter les droits du candidat et de sécuriser la procédure d’achat. L’article LP 235-3 V du CPMP prévoit explicitement cette démarche :
- Demande d’explications écrite au candidat – « L’acheteur public met en œuvre tous moyens lui permettant de détecter les offres anormalement basses. Si une offre paraît anormalement basse, l’acheteur public demande au candidat qu’il fournisse les précisions et justifications sur le montant de son offre. Si, après vérification des justifications fournies, l’acheteur public établit que l’offre est anormalement basse, il la rejette dans des conditions prévues par arrêté pris en conseil des ministres.». Autrement dit, dès qu’une offre paraît suspecte (prix très en-dessous des autres offres ou de l’estimation), l’acheteur public doit interroger le candidat sur les composantes de son prix. Cette demande d’explication doit être formulée de manière claire et permettre au candidat de justifier pleinement le sérieux de son offre. Exemple :l’acheteur envoie un courrier indiquant que son offre semble anormalement basse et lui demande de fournir toutes les justifications utiles (méthodes de calcul, conditions particulières d’exécution, économies réalisées, etc.).
- Analyse des justifications fournies – Le candidat va répondre en détaillant pourquoi son prix est aussi bas. Il peut, par exemple, invoquer un procédé technique innovant, des conditions exceptionnellement favorables(fournitures à bas coût, subvention publique, etc.), une organisation particulièrement efficace, ou encore l’originalité de son offre pour expliquer son tarif avantageux. Bon à savoir : le code (art. A 235-2 du CPMP) énumère des types de justifications acceptables, comme les modes de fabrication, les modalités d’exécution, les solutions techniques, l’originalité de l’offre, sans que cette liste soit exhaustive. L’acheteur public appréciera la pertinence de ces explications et peut, s’il le souhaite, tenir compte d’éléments complémentaires (par exemple, il n’est pas obligé de poser des questions ultra-précises – une demande générale de justification suffit ).
- Décision motivée de rejet si l’offre est confirmée anormalement basse – « Si, après vérification des justifications fournies, l’acheteur public établit que l’offre est anormalement basse, il la rejette par décision motivée. ». Autrement dit, si les explications du candidat ne justifient pas de manière convaincante son prix très bas, l’acheteur doit écarter l’offre en cause. Le rejet doit être formalisé par écrit et motivé (en exposant, par exemple, que les coûts incompressibles du projet ne pourraient être couverts, ou que les justifications fournies ne permettent pas de considérer l’offre comme économiquement viable). Important : tant que l’acheteur n’a pas obtenu et examiné les explications, il lui est interdit d’éliminer le candidat pour offre anormalement basse. Une élimination automatique sans dialogue préalable constituerait un manquement grave. La jurisprudence sanctionne d’ailleurs l’acheteur qui écarterait une offre suspecte sans avoir mené cette procédure contradictoire (illégalité de la décision).
En synthèse, le rejet d’une offre pour motif d’« offre anormalement basse » n’est possible qu’après avoir mis en œuvre cette procédure contradictoire. Cette obligation garantit la transparence et laisse sa chance au candidat de défendre son offre (parfois, les écarts de prix sont justifiés et l’offre peut finalement être retenue si elle s’avère sérieuse).
Une offre définitivement qualifiée d’anormalement basse doit être éliminée de la procédure. Le CPMP assimile en pratique cette offre à une offre irrégulière, insusceptible d’être acceptée ou régularisée. En effet, l’article LP 235-3 du CPMP précise que les « II. – Dans les procédures d’appel d’offres et les procédures adaptées sans négociation, les offres irrégulières, inappropriées ou inacceptables sont éliminées. Toutefois, l’acheteur public peut autoriser tous les candidats concernés à régulariser les offres irrégulières dans un délai approprié, à condition qu’elles ne soient pas anormalement basses.»
👉 Offre non régularisable – Contrairement à certaines offres irrégulières classiques qui peuvent désormais être régularisées (par ex. fourniture a posteriori d’un document manquant), une offre anormalement basse ne peut pas être « corrigée » ou complétée pour redevenir acceptable. Le principe d’intangibilité de l’offre s’oppose en effet à toute modification substantielle de la proposition après la remise des plis, en particulier une augmentation du prix pour le rendre viable serait contraire aux règles de mise en concurrence. Ainsi, si un candidat a proposé un prix trop bas, il ne pourra pas le réviser à la hausse une fois les offres ouvertes (sauf à ce que ce soit pour rectifier une erreur matérielle évidente reconnue par la jurisprudence, cas très particulier). La seule issue pour une offre anormalement basse avérée est son rejet pur et simple dans le respect de la procédure décrite ci-dessus.
À noter : Une offre soupçonnée anormalement basse peut finalement être admise si les justifications du candidat sont jugées convaincantes. Dans ce cas, l’acheteur public considère que le prix, bien que bas, ne compromet pas la bonne exécution et l’offre reste en concurrence. Cette appréciation relève du pouvoir de l’acheteur public, sous le contrôle du juge en cas de contestation (contrôle limité à l’erreur manifeste d’appréciation).
Si l’acheteur public, à l’issue de la procédure contradictoire, décide tout de même de retenir une offre anormalement basse, il s’expose à plusieurs risques majeurs pour le marché concerné :
- Risque financier : un prix très bas est souvent sous-estimé par rapport aux prestations réelles. Le titulaire du marché pourrait, en cours d’exécution, réclamer des compléments de rémunération ou des avenants pour boucler son budget. Le marché initialement bon marché devient alors plus coûteux que prévu, et ces modifications en cours de contrat peuvent bouleverser l’économie du marché et remettre en cause l’égalité de la mise en concurrence initiale.
- Risque d’exécution / opérationnel : un titulaire ayant proposé une offre insuffisamment chère risque de ne pas pouvoir exécuter correctement le marché. Cela peut se traduire par des retards, une qualité de prestation médiocre, le non-respect de certaines spécifications techniques, voire une défaillance pure et simple du titulaire (abandon de chantier, rupture d’approvisionnement). L’acheteur public devrait alors gérer une résiliation et lancer un marché de substitution en urgence, avec toutes les conséquences que cela implique.
- Risque social et légal : pour tenir un prix anormalement bas, certains opérateurs peuvent être tentés de rogner sur les coûts illégalement (ex : recours au travail dissimulé, non-respect des normes de sécurité, sous-traitance non déclarée). Outre les problèmes juridiques et éthiques que cela soulève, ces pratiques exposent l’acheteur public à des aléas importants (accidents, sanctions, retards). Par ailleurs, un concurrent évincé pourrait contester l’attribution du marché en faisant valoir que l’offre retenue était anormalement basse et aurait dû être écartée : le juge pourra alors vérifier si l’acheteur a commis une erreur manifeste en n’écartant pas cette offre et si la procédure contradictoire a bien été respectée.
En somme, la réglementation anti-OAB protège l’acheteur public lui-même : écarter une offre anormalement basse évite de graves déconvenues ultérieures et garantit que le marché sera exécuté par un prestataire ayant proposé un prix réaliste et soutenable.
Identifier une offre anormalement basse demande une analyse comparative et du bon sens de la part de l’acheteur. Voici quelques indicateurs et exemples concrets permettant de détecter les offres potentiellement anormales :
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- Écart de prix très significatif par rapport aux autres offres : C’est souvent le premier signal d’alerte. Par exemple, si la plupart des offres se situent autour de 100 millions F CFP, mais qu’un candidat propose 60 millions F CFP, soit 40% plus bas, l’offre de ce candidat paraît suspecte. Un écart de prix anormalement important (par rapport à la moyenne des offres reçues ou à l’offre suivante la moins chère) justifie de déclencher la procédure de demande de justifications. Attention : cet écart de prix, à lui seul, ne suffit pas juridiquement à qualifier l’offre d’anormalement basse. Il doit être corroboré par l’analyse de l’offre (contenu technique, coûts omis, etc.) montrant que le prix est manifestement sous-évalué.
- Prix défiant toute logique économique ou technique : Une offre dont le montant est inférieur au coût incompressible des ressources nécessaires est probablement anormale. Exemple : pour un marché de nettoyage de locaux, si l’on estime que rien que le paiement du personnel au SMIG pour la durée du marché coûtera 10 millions F CFP, une offre à 8 millions F CFP est objectivement trop basse pour couvrir les salaires, donc potentiellement non viable. De même, dans des travaux, si l’offre n’intègre pas certaines dépenses obligatoires (reprise du personnel, évacuation des déchets, garanties, etc.), son prix sera artificiellement bas. La jurisprudence a toutefois nuancé qu’un prix ne couvrant pas entièrement un coût imposé n’est pas forcément OAB s’il existe des moyens de compenser une partie de ce coût. Par exemple, une entreprise n’ayant pas répercuté la totalité du coût de reprise de salariés dans son offre n’a pas été considérée en OAB, car elle pouvait répartir ou absorber une partie de ce coût autrement (CE, 1ᵉʳ mars 2012, Département de la Corse-du-Sud).
- Offre très inférieure à l’estimation de l’acheteur public : L’acheteur dispose souvent d’une estimation budgétaire ou d’une idée du juste prix du marché. Si une offre est nettement en dessous de cette estimation (par ex. moitié moins chère que l’enveloppe budgétaire prévue), il faut s’en inquiéter. Illustration : un projet de travaux estimé à 80 millions F CFP obtient une offre à 50 millions – un tel écart invite à vérifier si le candidat n’a pas oublié des postes de coût ou fait une erreur dans son chiffrage.
- Seuil mathématique d’anomalie : Bien qu’il soit interdit d’écarter automatiquement une offre en se basant uniquement sur un calcul mathématique (la CJUE a jugé illégale l’exclusion automatique sans dialogue, quel que soit le seuil fixé), l’acheteur peut utiliser des outils de calcul pour repérer les offres potentiellement anormales. Par exemple, définir un “seuil d’alerte” à 20% ou 25% en dessous de la moyenne des offres. Toute offre sous ce seuil sera examinée de près et fera l’objet d’une demande de justifications. Cette méthode aide à objectiver le soupçon, à condition de ne pas en faire un couperet automatique mais bien le déclencheur de la procédure contradictoire.
- Comparaison avec les offres concurrentes : Si une entreprise est la seule à proposer un tarif très bas alors que tous les autres candidats ont des prix sensiblement plus élevés, il y a un doute sur sa proposition. Toutefois, il faut aussi considérer le contexte de la concurrence : il se peut que tous les autres se soient entendus pour relever les prix (entente illicite) ou que l’entreprise moins-disante ait des atouts lui permettant de casser les prix. Donc, un prix unique bas n’est pas systématiquement anormal, mais il justifie une vérification approfondie. Le Conseil d’État a d’ailleurs averti qu’une offre ne doit pas être qualifiée d’anormalement basse uniquement parce qu’elle est beaucoup plus basse que celles des concurrents, sans examiner si le prix est en lui-même injustifié. Par exemple, dans l’affaire CE, 3 nov. 2014, Office national des forêts, l’administration a eu tort de s’appuyer seulement sur l’écart de 30% avec l’offre suivante pour éliminer l’offre la moins chère, sans chercher à comprendre l’origine de ce prix bas.
- Contexte et justifications particulières : Lors de l’analyse, l’acheteur doit rester ouvert aux explications légitimes d’un prix très bas. Exemples concrets : un candidat peut proposer un tarif imbattable parce qu’il détient déjà un stock de matériaux acheté à bas prix les années précédentes, parce qu’il a développé une nouvelle technologie lui permettant de produire à moindre coût, ou encore parce qu’il bénéficie d’aides/subventions (par ex. aide à l’emploi, à l’investissement) réduisant ses charges. De même, une offre groupée (candidat réalisant des économies d’échelle sur plusieurs lots) ou l’originalité d’une solution technique peuvent expliquer un prix inférieur à la concurrence. Si ces facteurs permettent de prouver la viabilité économique de l’offre, celle-ci ne sera pas considérée comme anormalement basse malgré son bas prix initial. En revanche, en l’absence de justifications solides, une offre très en dessous des standards du marché restera présumée anormale.
Pour compléter cette fiche, voici quelques décisions jurisprudentielles marquantes illustrant le traitement des offres anormalement basses, en France ou au niveau européen :
- CE, 1ᵉʳ mars 2012, Département de la Corse-du-Sud (n°354159) – Offre basse vs obligations sociales. – Le Conseil d’État a jugé qu’une offre n’est pas nécessairement anormalement basse au seul motif qu’elle n’intègre pas la totalité d’un coût salarial imposé. En l’espèce, le candidat n’avait pas pleinement répercuté le coût de la reprise du personnel de l’ancien titulaire, mais le CE a estimé que cela ne rendait pas son offre irrémédiablement sous-évaluée compte tenu de ses possibilités de redéploiement de ces salariés. Il convient donc d’apprécier au cas par cas si un coût omis compromet réellement l’exécution du marché.
- CE, 29 octobre 2013, Département du Gard (n°371233) – Demande de précisions non dirigiste. – Lorsqu’il suspecte une OAB, l’acheteur n’est pas tenu de poser des questions pointues ou de suggérer les points à expliquer. Il doit solliciter du candidat « toutes précisions et justifications » utiles sur son prix, sans avoir à détailler tel ou tel élément. Dans cet arrêt, le CE a validé une demande d’explication générale faite à un candidat, considérant qu’elle lui avait permis de justifier son offre de manière complète.
- CE, 3 novembre 2014, Office national des forêts (n°382413) – Écart de prix et notion d’OAB. – Le CE a annulé la décision d’un acheteur qui avait écarté l’offre la moins-disante uniquement parce que son montant était très inférieur à celui des autres offres. Le Conseil d’État a rappelé qu’un écart de prix ne suffit pas : l’acheteur doit vérifier si le prix en question est objectivement sous-évalué au point de compromettre le marché. Cet arrêt insiste sur la nécessité d’un examen qualitatif de l’offre et pas seulement d’un calcul arithmétique de différence de prix.
- CJUE, 22 juin 1989, Fratelli Costanzo (aff. C-103/88) – Interdiction des seuils d’élimination automatiques. – La Cour de justice de l’UE a censuré une pratique consistant à éliminer d’office des offres en dessous d’un certain seuil sans demander d’explications. Une exclusion automatique sur critère purement mathématique viole le droit européen, car elle prive le soumissionnaire de la possibilité de justifier son offre. Cette jurisprudence, confirmée par la suite (CJCE Lombardini 2001, CJUE Secap 2008), a conduit les législations française et polynésienne à exiger une procédure contradictoire plutôt que des seuils arbitraires.
- CJUE, 19 mai 2009, Assitur (aff. C-538/07) – Évaluation du caractère bas de l’offre. – La CJUE a souligné que si un pouvoir adjudicateur décide de retenir une offre à prix très bas, il doit être en mesure d’expliquer pourquoi il ne la considère pas comme anormalement basse. Un candidat évincé peut demander ces justifications. Cette exigence de transparence a été réaffirmée récemment (CJUE, 11 mai 2023, Sopra Steria aff. C-101/22), la Cour estimant que l’acheteur doit fournir aux évincés les raisons détaillées pour lesquelles l’offre retenue n’a pas été écartée comme OAB. Cela incite les acheteurs à documenter soigneusement leur analyse lorsqu’ils décident qu’une offre, bien que très basse, est recevable.