Convié par la ministre de la Culture Fleur Pellerin, Heremoana Maamaatuaiahutapu, ministre polynésien de la Culture a ouvert, mercredi au musée du Quai Branly, la conférence internationale « de Palmyre à la révolution numérique : les défis de la diversité culturelle ». Quelques jours après les attentats à Paris, cette conférence s’est déroulée dans un contexte particulier, empreint d’émotion. Dix ans après la signature de la convention Unesco sur la protection et la promotion de la diversité culturelle, celle-ci apparait plus que jamais menacée tant par la révolution numérique que l’intolérance destructrice de Daesh et des Djihadistes dans le monde.

Le ministre polynésien de la culture a souhaité évoquer, d’emblée, les terribles attentats qui ont frappé Paris le 13 novembre dernier. Une atteinte intolérable, selon lui, à l’expression de la diversité culturelle et à la tolérance, autant de valeurs partagées par tous les Polynésiens. « Ces attaques portées sur le sol français sont ressenties par tous les Polynésiens comme une atteinte profonde et insoutenable à notre liberté et notre dignité » a-t-il martelé.

«Entrer en résistance»

Dans ce terrible contexte, Heremoana Maamaatuaiahutapu a affirmé qu’i fallait « entrer en résistance » pour préserver la diversité et la mixité. Pour le ministre polynésien, face ces attentats parisiens, il devient impérieux de renforcer l’adhésion aux valeurs de la République que partagent fièrement les Polynésiens avec l’ensemble du peuple français.

Et de rappeler que « notre culture, nos langues, nos chants, nos danses, nos haka ont toujours été notre plus belle arme, nous Polynésiens-Français, homme et femmes du Pacifique, citoyens du monde » dans ce combat contre l’obscurantisme. Une volonté de lutter contre l’intolérance, mais pas seulement à Paris puisque cette conférence internationale a mis, notamment, en exergue Palmyre. Cette oasis du désert de Syrie, abrite des ruines archéologiques. Elle est classée au patrimoine mondial de l’Unesco. La destruction par les Djihadistes de nombre de ses vestiges imposants a démarré fin aout 2015 et s’est poursuivie jusqu’en octobre 2015. Rien d’étonnant donc à que ce site soit devenu un symbole pour tous les défenseurs de la diversité culturelle.

« Etre moteurs de nos connaissances »

Heremoana Maamaatuaiahutapu a tenu à souligner que le monde polynésien était, depuis des temps immémoriaux, un exemple de diversité culturelle. Il a rappelé que les Polynésiens n’hésitaient pas à traverser l’océan Pacifique pour se rejoindre, régulièrement, sur le marae de Taputapuatea. Au passage, le ministre a aussi noté que, malgré les distances qui les séparaient, « nos anciens échangeaient bien plus que nous ne le faisons alors que les moyens de communication et de transport se sont considérablement développés. Comme si le sillage des pirogues ancestrales avait été bien plus efficace que les autoroutes numériques ».

En Polynésie, l’heure est à l’affirmation dynamique et à la valorisation de l’héritage culturel. Les démarches entreprises pour que le marae de Taputapuatea soit inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco en sont une des traductions, tout comme les efforts fait pour transmettre, dans les domaines de la danse et du chant, un savoir communiqué jusqu’à présent par la tradition orale.

Si le gouvernement de la Polynésie française mise sur les nouvelles technologies pour conserver et diffuser les acquis culturel, il demeure vigilant sur la tentation qui prévaudrait d’un repli sur soi, au risque, d’ailleurs, de se couper des jeunes générations. La parade, face au déferlement d’informations venues du monde entier est de créer du contenu, selon le ministre de la Culture, qu’il s’agisse d’images ou de sons, pour faire rayonner la culture polynésienne. « Nous devons être moteurs de nos connaissances » a-t- il ainsi déclaré à la tribune lors de la conférence.

Un tsunami culturel

Tandis que se profile la COP 21, au cours de laquelle seront évoquées les problématiques du réchauffement climatique et de la montée des eaux, le ministre polynésien de la culture et de l’environnement compte bien, aux côtés du président Edouard Fritch faire entendre la voix de la Polynésie. Dans le même temps, il compte continuer de mener une bataille « contre le tsunami culturel que nous subissons ».

En conclusion Heremoana Maamaatuaiahutapu a indiqué que « la diversité, nous en avons fait notre mode de vie depuis des générations ». Et si tout n’est pas toujours simple, si cela peut générer des tensions, au bout du compte « cela nous enrichit et nous mène à une grande tolérance » s’est-il réjoui.

Cette conférence a réuni des intervenants de très grande qualité. A commencer par Stéphane Martin, président du Musée du Quai Branly, Irina Bokova, Directrice générale de l’Unesco, Jean-Luc Martinez, Président-Directeur du Musée du Louvre, Dany Laferrière écrivain, membre de l’Académie française, Pascal Nègre, président D’Universal Music France ou encore Pascal Rogard, président de la coalition française pour la diversité culturelle, qualifié par Jean-Jacques Aillagon, ancien ministre de la Culture, comme « un ministre du cinéma » officieux.

 

pellerin heremoana